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Congomonpays.
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  • Ce qu'on appelle union, dans un corps politique, est une chose très équivoque; la vraie est une union d'harmonie, qui fait que toutes les parties, quelques opposées qu'elles nous paraissent, concourent au bien général de la société...Jean Bertin L.L
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22 mars 2010

Mieux vaut prévenir que guérir


(Le Potentiel 22/03/2010) 


« Le Congo reprend des couleurs et va bientôt arriver à une vitesse de croisière qui va le faire monter en puissance ». Dixit Louis Michel. « Les institutions ne suffisent pas pour faire une démocratie, il faut que cette dernière s’inscrive aussi dans les moeurs de la classe politique et du peuple ». Réplique Karel De Gucht. « Joseph Kabila représente l’espoir pour le Congo », renchérit Louis Michel. « Je n’ai pas rencontré d’homme d’Etat au Congo », rajoute Karel De Gucht.

Cette passe d’armes entre deux personnalités politiques belges, par surcroît anciens ministres belges des Affaires étrangères et commissaire et député européen, démontre en elle –même que le plus difficile est devant nous. Et comme pour me donner raison, un autre belge, député socialiste flamand, Dirk Van der Maelen, vient à la rescousse de Karel De Gucht en réagissant véhémentement contre l’invitation lancée par le ministre belge à la Défense à son homologue congolais pour qu’un détachement militaire des FARDC défile le 21 juillet prochain, jour de la fête nationale belge, à Bruxelles : « Ce n’est pas parce qu’on est partenaire qu’il faut défiler, cote à cote le 21 juillet. Je désapprouve la politique conciliante du Gouvernement à l’endroit du président congolais Joseph Kabila qui ressemble à Mobutu. Il y a un gouvernement d’une clique et la population souffre ».

Ces propos sulfureux méritent une réflexion profonde pour tirer des leçons de toutes ces années de guerre. Si les causes profondes consistent en la main mise sur les richesses congolaises, la première guerre africaine venait de se dérouler en terre congolaise sur fond des enjeux géopolitiques. La plupart de nos voisins ont été impliqués, soit directement, c’est le cas du Rwanda, de l’Ouganda, du Burundi, contre la RDC, et l’Angola aux côtés de la RDC. Soit indirectement au travers ceux qui ont joué aux indécis, prêts à prendre acte de la « fin de la guerre » pour se ranger du côté du vaincu ou des vainqueurs. Mais la cause du peuple congolais étant noble et juste, la balance se penche de son côté, comme le démontre si clairement l’évolution des derniers événements.

Louis Michel, qu’on l’aime ou qu’on ne l’aime pas, n’a pas du tout tort. La République démocratique du Congo est en train « de reprendre les couleurs et va bientôt arriver à une vitesse de croisière qui va la faire monter en puissance ». Ces propos encourageants prouvent à suffisance que la RDC a fourni de nombreux efforts, depuis le Dialogue intercongolais à Sun City jusqu’ à la mise en place des institutions légitimes installées au terme des élections de 2006.

Mieux que cela, le Congo s’est fait violence pour lever des options sur la politique de bon voisinage tant il est vrai qu’on ne choisit jamais ses voisins. Mais il faut faire avec eux. Les illustres personnalités en visite en RDC n’ont raté aucune opportunité pour brandir le cas de l’Europe avec la mésaventure de l’Allemagne des Nazis émaillée par deux guerres mondiales.

Dans la dernière interview qu’il a accordée au journal Le Soft, le président de la République, Joseph Kabila Kabange, souligne justement les efforts accomplis au plan diplomatique. « Je dois vous assurer que le Congo entretient les meilleures relations avec tous les neuf pays voisins. Tous les problèmes qui se posent le long de nos frontières communes et qui ne datent pas d’aujourd’hui trouveront leurs solutions par voie diplomatique. A propos de l’Equateur, il n y a plus aucun problème dans la province, je veux vous l’assurer. Avec le Rwanda et l’Ouganda, nous avons procédé à l’échange d’ambassadeurs et il y a rien à signaler ».

Parallèlement, la RDC devenait fréquentable avec ces chassés-croisés diplomatiques intenses. Des moments importants qui ont poussé des personnalités politiques de croire que le danger est écarté pour vanter les richesses congolaises, les opportunités d’investissement dans ce pays.

Mais la passe d’armes entre Louis Michel et Karel De Gucht n’est pas un fait divers. Elle doit plutôt ramener les Congolais sur terre afin qu’ils aient bien leur tête entre leurs épaules. Qu’ils sachent que l’on n’est pas encore au bout de nos peines tant la reprise des couleurs par la RDC irrite certaines forces négatives à travers le monde.

En fait, c’est à cause justement de ces richesses que le Congo a été agressé, soumis à des pressions pour le pousser à la balkanisation. Ces causes qui sont à la base de cette guerre de minerais ont-elles été évacuées ? La réponse est négative.

Je dirais tout simplement que la « guerre » est en train de changer de terrain à travers toutes ces mutations qu’on observe dans la région de l’ Afrique des Grands Lacs et de l’ Afrique australe. De prime abord, il s’agit d’un nouveau leadership dans la région. Si l’Afrique du sud a joué au médiateur dans la crise congolaise, c’est parce qu’elle est sur la ligne de départ. Considérée comme pays émergent avec la Chine, l’Inde, le Brésil, l’Afrique du sud est déjà dans la cour des grands. Elle est en train d’exprimer clairement ses ambitions. Mais manifeste discrètement son mécontentement à l‘endroit de la RDC dans la mesure où les accords conclus entre les deux pays dans les domaines minier et énergétique n’ont jamais abouti.

L’Angola est une « puissance » qui monte dans cette région subsaharienne. Il dispose à la fois d’une force militaire dissuasive et de la force financière grâce à son pétrole. Malheureusement, ce pétrole que l’Angola a longtemps exploité seul, pourrait devenir la pomme de discorde avec ses voisins immédiats, à savoir les deux Congo. Mais dans un premier temps, la délimitation des frontières maritimes soulève déjà un débat houleux qui conduirait à un arbitrage international entre la RDC et l’Angola si jamais les deux pays ne parvenaient pas à un compromis. Quand on sait que la délimitation des bornes frontières à Kahemba, suivie des expulsions des ressortissants, de part et d’autre, ont assombri pendant un moment les nuages entre les deux pays, la guerre du pétrole le long du littoral a commencé. D’ailleurs, il me revient des sources concordantes que le gouvernement angolais a examiné le 17 mars 2010 un protocole d’accord signé entre la RDC et Cabinda Gulf Oil Corporation concernant la construction du gazoduc « Cabinda-Soyo ». Apparemment, le gouvernement angolais n’a pas apprécié cet accord et s’apprêterait à adresser une note de protestation à Kinshasa par voie diplomatique. Cette affaire avait déjà été ébruitée aux lendemains de l’attaque contre l’équipe nationale du Togo.

A l’Est, la mise en place d’une « Bourse » de matières premières à Kigali, et le Rwanda qui deviendra une « Zone franche » ne garantissent pas un climat de bon voisinage. Bien plus, le coeur du Rwanda se balance maintenant entre le Commonwealth et la Francophonie, entre l’Afrique de l’Est et la CEPGL, à la recherche des partenaires de tout acabit.

Que dire du pétrole du Lac Albert avec l’Ouganda qui sort déjà ses dents ? Tant que la LRA ne sera pas neutralisée et lui servira de prétexte sécuritaire, les relations avec la RDC ne tiennent qu’à un fil. Trêve alors de naïveté.

Au regard de ce qui précède, la réunion interinstitutionnelle qui s’est tenue le week-end dernier à la ferme présidentielle de Kingakati, s’est-elle appesantie sur cet avenir immédiat de notre pays ? Sinon, il y a urgence. Mieux vaut prévenir que guérir. .


Par Modeste MUTINGA






(*) Sénateur

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